Comment vous convaincre de rester? La vie est une suite de douleurs, je n'en doute pas un seul instant. Moi-même j'ai perdu ce que j'avais de plus cher : mes parents, ma compagne et mon meilleur ami.
Souvent, enfin non, parfois, je me dis : mais que reste-t-il? Tous les jours, j'ai au téléphone la grand-mère de l'ami dont je viens de parler, et elle me pose régulièrement cette question.
A chaque fois, je lui répond qu'il nous reste l'espoir, que ce n'est sans doute pas grand chose mais qu'en même temps c'est tout. Oui, je le pense vraiment et j'ai l'intime conviction que s'il ne nous restait pas au moins ça alors effectivement, nous n'aurions plus grand chose à faire ici.
Mais je crois en cet espoir. Fermement, définitivement. Je suis toujours estomaqué de voir, je l'ai déjà dit, à quel point la plupart des gens sont seuls. A quel point ils sont désespérés. A quel point ils ne savent vers qui se tourner, par crainte, par méfiance ou parce qu'ils imaginent que personne ne peut les aider.
C'est faux. Mais il est permit à chacun de commettre des erreurs, peut-être tout simplement parce que nous sommes humains et que nous devons avoir de l'indulgence pour ceux que nous côtoyons, tout comme nous devons en avoir pour nous-mêmes. Je pense que c'est ce qui nous différencie d'un simple objet, oui, d'un bibelot qui a certes son utilité mais qui, mis-à part dans le coeur de celui qui le possède, n'a pas d'importance capitale.
J'ai envie de vous dire soyez vous-mêmes, vivez non pas parce que c'est une obligation, mais parce que c'est un cadeau que parfois on a du mal à comprendre ou apprécier. Je ne suis pas un optimiste forcené, quoi que je puisse laisser transparaître, mais j'ai vu, de par mes yeux et par mon âme, ce qu'un suicide pouvait engendrer. Une mort naturelle est d'ailleurs identique de par les effets de vide et de manque qu'elle procure mais ne possède pas, il est vrai, cette notion de violence désespérée.
Moi-même je l'ai envisagé. Souvent. Pas par facilité, non, ça, ce serait trop simpliste, enfin, quoi que si, d'une certaine façon, agir de la sorte pourrait vouloir dire que l'on simplifie un processus dont on est plus maître. Et alors? Cela veut-il dire qu'on ne doit absolument pas croire que les choses puissent s'arranger? Pas toutes, c'est vrai, mais au fond, est-ce vraiment important? Sommes-nous obligés de vivre juste pour démontrer à autrui que nous pouvons démolir tous les murs qui se dressent en face de nous? Vraiment? Non, enfin moi en tout cas j'ai envie de dire non.
Je me fiche éperdument de ce que les gens pensent, ce qui m'importe, c'est ceux que j'aime, et qui m'aiment aussi, oui, ce sont eux ma plus grande préoccupation. C'est eux que j'ai envie d'aimer, pas un idéal que je n'ai pas et que je n'aurai jamais. Je ne serai jamais cosmonaute. Je ne serai jamais pompier ou policier. Je ne serai jamais non plus un grand avocat ou un acteur célèbre. Et alors?
Je serai moi-même, tout simplement, celui qui a de l'importance aux yeux de quelques uns et cette perspective, je vous l'avoue, me suffit largement.
Je ne roulerai probablement jamais en Porsche, pas plus que je n'aurai une villa dans quelque paradis que ce soit. Moi, mon paradis, c'est les autres, oui, c'est le sourire des gens qu'on aime et qui se savent non jugés, juste parce qu'ils sont eux et que nous sommes nous, pas des êtres abstraits mais des gens qui nous aimons parce que nous avons osé ce choix, parce que oui, à nouveau, il faut l'oser.
Nous rendons nous compte que nous avons une chance inouïe de pouvoir nous exprimer grâce à notre langage? J'ai envie de dire mais bon sang, faisons-en usage puisque ce don nous a été donné et cessons (ça s'apprend) à moins nous soucier de ce que les autres peuvent penser de nous, fondamentalement, ça n'a pas beaucoup d'importance...