Dépigmentation : peau, visage, cause, quels traitements ?

Dépigmentation : peau, visage, cause, quels traitements ?

Si la dépigmentation de la peau est généralement bénigne, elle a un fort retentissement sur la vie sociale de celui qui en souffre. Quelles sont les causes ? Quelles parties du corps sont concernées ? Comment traiter cette affection cutanée ? Le point avec le Pr Thierry Passeron, dermatologue et vénérologue.

Définition : qu'est-ce qu'une dépigmentation de la peau ?

La dépigmentation est une décoloration de la peau. Dans certaines zones, la peau possède moins ou plus du tout de mélanines, les pigments naturels de la peau. Les causes peuvent être nombreuses. Elle sont parfois d'origine génétique, mais sont le plus souvent acquises. Le désagrément est essentiellement esthétique mais entraîne un fort impact sur la qualité de vie des personnes. "Cependant, ces dépigmentations constituent un signe qui doit faire rechercher d'autres anomalies. Selon les causes, il est parfois possible de traiter la dépigmentation soit par greffe de peau, soit par un traitement médical", nuance le Pr Thierry Passeron.

Quelles parties du corps peuvent être touchées ? 

Selon les causes, la dépigmentation peut être généralisée comme dans l'albinisme. Toute la peau, mais aussi les yeux, sont alors touchés. Certaines maladies occasionnent des plaques blanches qui peuvent atteindre n'importe quelle partie du corps. Lorsque ces plaques sont d'origine génétique, elles peuvent être isolées ou associées notamment à une surdité, un problème de développement psychomoteur, ou encore des troubles digestifs. Il existe aussi des maladies génétiques qui entraînent une diminution de la carnation, mais sans que la peau soit totalement blanche. On parle alors de dilution pigmentaire

Quelles sont les causes d'une dépigmentation de la peau ? 

La dépigmentation de la peau regroupe deux grands types d'affections cutanées : les dépigmentations congénitales, c'est-à-dire présentes dès la naissance, et les dépigmentations acquises qui apparaissent dans le courant de la vie. Les dépigmentations congénitales : on distingue des maladies génétiques comme l'albinisme, lié à un dysfonctionnement des gènes qui fabriquent la mélanine, mais il existe de nombreuses autres maladies génétiques entrainant des dépigmentations. "Les enfants naissent avec une peau complètement blanche ou en tout cas plus claire que la normale. Il existe également des maladies génétiques qui entrainent des dépigmentations en plaques ou linéaires. Il est très important de consulter un dermatologue spécialiste à l'hôpital pour faire en fonction de la présentation clinique un bilan complet parce que cette dépigmentation peut être associée ou non à d'autres malformations ou des problèmes de développement psychomoteur", explique le Pr Thierry Passeron. Les dépigmentations acquises qui provoquent des plaques plus ou moins blanches sur la peau ou entraînent une dépigmentation complète. C'est le cas de l'hypopigmentation post-inflammatoire qui se caractérise par une inflammation de la peau liée à une dermatose et qui va donner des plaques plus claires mais pas totalement blanches. "La plus fréquente d'entre elles est ce que l'on appelle communément les dartres (eczématides achromiantes) qui se traduisent par de petites plaques d'eczéma rendant la peau plus sèche et plus claire. Il n'y a pas d'inquiétude particulière à avoir. D'autres maladies inflammatoires de la peau, comme le psoriasis peuvent donner des taches blanches, notamment sur les peaux mates ou noires. Ou encore des mycosis fongoïdes, des lymphomes cutanés entraînant la prolifération de globules blancs sur la peau qui peuvent favoriser l'apparition de taches blanches. Enfin, le vitiligo, qui touche 0,5 à 2% de la population mondiale, se manifeste par des taches complètement blanches. C'est une maladie auto-immune, dans laquelle le système immunitaire va attaquer et détruire les mélanocytes qui fabriquent la pigmentation de la peau. Il faut savoir que la moitié des vitiligos débute avant l'âge de 20 ans et que 80% des vitiligo surviennent avant l'âge de 30 ans", indique le dermatologue. 

Qui est le plus à risque ? 

Plus on est mate de peau, plus on a de risques de développer des hyperpigmentations ou hypopigmentations post-inflammatoires. Pour le vitiligo, on est tous égaux, quel que soit le sexe et l'origine. 

Traitement : que faire contre une dépigmentation de la peau ? 

Le traitement de la dépigmentation dépend avant tout de sa cause. Pour les pigmentations post-inflammatoires, il faut traiter en priorité la dermatose inflammatoire responsable. Pour le vitiligo, le traitement repose sur l'association d'UV (soleil ou UVB en cabines chez le dermatologue) et de traitements locaux (dermocorticoïde ou tacrolimus). "Contrairement à une idée reçue, les personnes ayant un vitiligo, même si elles ont des plaques blanches, n'ont pas plus de risques de faire des cancers de la peau si elles s'exposent au soleil. Au contraire, elles ont trois fois moins de risques de développer un mélanome", rectifie notre interlocuteur. "Ce sont les UV qui permettent de repigmenter le vitiligo. On arrive à repigmenter complètement 7 à 8 fois sur 10 les plaques du visage qui sont les plus simples à traiter, une fois sur deux celles du corps, une fois sur trois voire sur quatre celles des coudes, genoux et saillies osseuses. Là où le traitement reste très difficile, c'est sur les extrémités des mains et des pieds. Pour obtenir ces résultats là, entre 6 et 24 mois de traitement sont nécessaires", continue-t-il. D'autres traitements, à l'instar des anti-JAK par voie orale qui sont déjà utilisés dans la polyarthrite rhumatoïde et l'eczéma, sont en cours d'essais cliniques sur les formes sévères de vitiligo où la dépigmentation concerne au moins 5% de la surface corporelle totale. Pour les formes plus localisées, les essais cliniques de phase 3 sont terminés pour le ruxolitinib (anti-JAK en crème). "Ce traitement a démontré une très bonne tolérance et une grande efficacité chez l'adulte et chez l'enfant à partir de 12 ans sur le visage, un peu moins satisfaisante sur le corps et malheureusement peu concluantes sur les mains et les pieds", informe le Pr Thierry Passeron.

Quels sont les remèdes naturels contre une dépigmentation de la peau ? 

Le meilleur traitement naturel, c'est le soleil ! Une étude randomisée en double aveugle VS placebo avec un antioxydant de dernière génération élaboré à partir du pépin de melon a montré que cela multipliait par deux les effets des UV et du soleil. Les résultats ont été publiés dans le Journal Européen de Dermatologie et de Vénérologie. Aucun effet secondaire n'a été constaté mais ces antioxydants seuls ne suffisent pas pour la repigmentation, le soleil ou des UV doivent être associés. D'autres remèdes naturels tels que l'aloe vera, l'huile d'onagre, la papaye, l'huile de germe de blé ou encore des cataplasmes de radis ou de basilic sont parfois évoqués mais leur efficacité n'a pas été démontrée d'un point de vue scientifique. 

Merci au Pr Thierry Passeron, dermatologue et vénérologue au CHU de Nice et chef d'équipe INSERM au C3M, Nice.