Aspect des selles : signification selon la couleur, fréquence

Aspect des selles : signification selon la couleur, fréquence

De par leur couleur, leur aspect, leur fréquence... Les selles en disent long sur votre santé. Que révèlent des selles noires, teintées de sang, jaunes, blanches, vertes ou oranges ? Et quelles maladies cachent-elles lorsqu'elles sont liquides, glaireuses ou douloureuses ?

Les selles, aussi appelées "matières fécales", sont de bons indicateurs de notre état de santé. Ce sont les résidus de la digestion que les intestins n'ont pas pu absorber. Elles sont composées d'eau à 75% et de débris de cellules intestinales, bactéries, cellulose à 25%. Mais que signifie leur couleur ? Et leur aspect et leur fréquence ? Des glaires ou du sang peuvent-ils cacher une maladie ? Réponses du Pr Jean-Christophe Saurin, chef du service d'hépato-gastroentérologie au CHU de Lyon et du Pr Patrick Marcellin, hépatologue. à l'hôpital Beaujon et président de l'Association pour l'amélioration de la prise en charge des patients atteints de maladies chroniques du foie.

Quelle est la couleur normale des selles ?

  • Chez l'adulte, des selles saines sont de couleur marron, plus ou moins foncé, plutôt lisses, molles et éliminées sans exercer d'effort. La couleur des selles est déterminée en fonction de sa teneur en pigments biliaires, mais peut être légèrement modifiée en fonction des aliments que l'on mange (betteraves, fruits rouges, épinards, réglisse, viande rouge...). 
  • Chez l'enfant, les selles peuvent être un peu plus clair, voire beige, 
  • Chez le bébé allaité, les selles peuvent être de couleur jaune (or, moutarde ou teinté de vert), avec des "grumeaux" et semi-liquides. 
  • Chez le bébé alimenté au biberon, les selles sont légèrement plus consistantes, mais peuvent rester verdâtres. Lorsqu'il grandit, le bébé a des selles de couleur marron. Leur consistance et leur couleur varient en fonction de son alimentation.

Selles claires, blanches ou jaunes : le pancréas qui dysfonctionne ?

Consultez si les selles sont blanches, jaunes et accompagnées de diarrhées. 

"Des selles blanches, qui virent au jaune signifient qu'il y a un problème d'absorption des graisses . Il n'y a que les graisses qui colorent les selles en blanc ou en jaune. Cela peut révéler un dysfonctionnement du pancréas ou un blocage de la bilirubine au niveau du foiealerte le Pr Saurin. La pancréas est un organe qui sécrète le liquide pancréatique. Ce liquide contient de nombreuses enzymes, capables de fragmenter les aliments lors de la digestion. Parmi ces enzymes, l'amylase permet de digérer les sucres (les glucides), la trypsine sert à la digestion des protéines et la lipase sert à celle des graisses (les lipides). Lorsque le pancréas dysfonctionne, les graisses ne sont plus correctement absorbées par l'intestin grêle, et sont rejetées dans les selles qui peuvent ainsi apparaître jaunes ou blanches. "Il faut alors immédiatement se poser des questions et consulter son médecin, particulièrement si les selles jaunes ou blanches sont accompagnées d'une diarrhée", poursuit notre interlocuteur. 

Selles noires ou rouges (sang dans les selles) : une maladie du foie ?

On attribue souvent le sang dans les selles à des hémorroïdes, à tort.

"Il y a pleins d'aliments qui colorent les selles en noir : les épinards, les betteraves, le boudin noir. Il ne faut donc pas trop s'affoler si après avoir consommé ces aliments, vos selles sont légèrement rouges, voire noires, rassure le Pr Saurin. En revanche, si les selles sont vraiment noires comme du charbon (méléna ou selles goudronneuses), là il y a matière à s'inquiéter". La présence de sang dans les selles n'est pas anodine et peut être le signe d'une maladie inflammatoire de l'intestin (maladie de Crohn, rectocolite...), d'une diverticulite, d'un cancer colorectal, mais le plus souvent d'une atteinte hépatique. "Un foie endommagé peut devenir fibreux et dur. Dans ce cas, le sang qui vient de l'intestin par la "veine porte" jusqu'au foie se trouve bloqué. Il est obligé de contourner le foie et ne peut donc plus le purifier correctement. Ce sang peut faire gonfler des veines de l'œsophage et provoquer des varices œsophagiennes. Ces varices peuvent éclater et provoquer des hémorragies." Des vomissements noirs ou des selles "goudronneuses" représentent une urgence médicale. Il faut consulter un médecin "Il ne faut jamais laisser des saignements dans les selles sans faire d'analyse, d'examen ou d'endoscopie. On attribue souvent le sang dans les selles à des hémorroïdes, à tort", insiste le gastro-entérologue.  En fonction des résultats, le médecin peut vous orienter vers un hépatologue qui pourra vous prescrire un bilan hépatique ainsi qu'un dosage du taux de prothrombine afin d'évaluer votre coagulation sanguine.

Selles vertes : un transit trop rapide ?

"La couleur des selles varie en fonction de ce qu'on mange. Elles peuvent devenir parfois verdâtre, sans que cela ne soit inquiétant", rappelle le gastro-entérologue. En effet, les selles peuvent être vertes après avoir mangé des légumes verts feuillus (chou, épinard...) ou des aliments contenant de la chlorophylle, un colorant vert : basilic, persil, menthe, spiruline.... Des selles vertes sans avoir mangé ces aliments peuvent également signifier que la bile se déplace trop rapidement à travers le côlon et que votre transit colique est "trop rapide". Ce n'est pas grave, mais parlez-en à votre médecin. Des examens des selles peuvent être nécessaires. 

Selles oranges : trop d'aliments riches en bêta-carotène ?

Les selles peuvent paraître de couleur orange après avoir ingéré beaucoup de bêta-carotène (via l'alimentation ou des compléments alimentaires par exemple). Le bêta-carotène est un pigment végétal et un antioxydant particulièrement présent dans la patate douce, la carotte, le potiron, les épinards, l'abricot, la tomate, la mangue ou le pruneau. 

L'échelle de Bristol

C'est un outil conçu en 1997 par l'Université de Bristol et utilisé par les médecins qui permet de classer les selles en 7 catégories afin d'identifier plus facilement un éventuel trouble des selles :

  • Type 1 : petites boules de selles dures et séparées
  • Type 2 : selles en forme de saucisse, selles grumeleuses
  • Type 3 : selles en forme de saucisse avec des craquelures à la surface
  • Type 4 : selles en forme de saucisse ou de serpent, lisses
  • Type 5 : morceaux irréguliers aux bords bien définis
  • Type 6 : selles mousseuses et semi-liquides, agglomérées en une matière pâteuse
  • Type 7 : selles sans morceaux solides, complètement liquides

Les selles optimales (transit normal) sont de types 4 ou 5. Les selles de types 1 à 3 peuvent suggérer une constipation due à un manque d'hydratation ou de fibres. Les selles de types 6 et 7 peuvent évoquer une diarrhée, symptôme évocateur de nombreuses maladies. 

Selles mousseuses ?

Des selles mousseuses peuvent évoquer une malabsorption des graisses. Si vos selles moussent et sont légèrement blanchâtres ou jaunâtres, il faut les surveiller et consulter un médecin. 

Selles en plusieurs morceaux ?

Des selles en plusieurs morceaux durs et douloureuses lors de la poussée sont des selles déshydratées, autrement dit, qui contiennent peu d'eau. Elles peuvent suggérer que vous ne buvez pas suffisamment d'eau dans la journée ou que vous manquez de fibres (contenues dans les fruits et légumes, ainsi que dans les céréales complètes). Cela peut également signifier que votre microbiote intestinal n'est pas assez riche en "bonnes bactéries". Consultez un médecin qui pourra vous conseiller de faire une cure de probiotiques par exemple. 

Selles glaireuses ?

La présence de glaires dans les selles peut signifier la présence d'un polype ou révéler une inflammation de la muqueuse du côlon (colite inflammatoire ou infectieuse). Si vos constatez la présence de glaires dans vos selles pendant plusieurs jours, consultez un médecin, surtout si elles sont accompagnées de douleurs abdominales et de diarrhées. 

Selles liquides ?

Les selles liquides évoquent des épisodes de diarrhée. Il ne s'agit pas d'une maladie à proprement parler, mais d'un symptôme évocateur de plusieurs maladies. Si les diarrhées persistent pendant plus de 72 heures et sont accompagnées de fièvre ou de sang, il faut consulter un médecin sans attendre. 

Selles douloureuses ?

La constipation est la cause la plus fréquente des selles douloureuses lors de la poussée. Il faut consulter un médecin qui vous aidera à déterminer l'origine de la constipation (manque d'activité physique ? manque de fibres ?). Une consommation de plats trop épicés peut occasionner des brûlures lors de la défécation. Enfin, des selles douloureuses peuvent être le signe de nombreuses pathologies qu'il ne faut pas négliger : hémorroïdes, fissure anale, abcès, côlon irritable, maladie cœliaque, maladie de Crohn, rectocolite, cancer colorectal... En cas d'inquiétudes par rapport à une douleur persistante, consultez votre médecin. 

Fréquence des selles : combien de fois par jour ?

"Ce qu'il faut retenir, c'est que le transit est très variable d'une personne à une autre : certaines personnes vont à la selle trois fois par jour tandis que d'autres ont une selle tous les deux ou trois jours et toutefois, on considère que cette fréquence reste dans la norme", indique d'emblée le Pr Saurin. En moyenne, l'être humain fait 150 g de selles par jour, émises en une ou deux fois. Un volume de selles supérieur à 200 g par jour peut signifier une diarrhée. A contrario, une fréquence des selles inférieure à 3 selles par semaine peut révéler une constipation, mais pas toujours. "Un transit reste relativement stable pendant plusieurs années. Lorsque votre transit change brutalement (couleur, consistance particulière, présence de sang ou de glaires), autrement dit, si vous aviez tendance à aller souvent à la selle et que d'un coup, vous êtes constipé, il faut se poser des questions et consulter un médecin", préconise notre interlocuteur. Ce médecin pourra réaliser un examen des selles ou une coproculture. Ces prélèvements de selles vont pouvoir déterminer si la qualité du microbiote intestinal et vont permettre d'avoir connaissance d'un éventuel dysfonctionnement de la digestion ou la potentielle présence d'une pathologie (maladie de Crohn, rectocolite...). "Plus le microbiote intestinal est riche et a des micro-organismes variés, meilleure est la santé intestinale", conclut le gastro-entérologue. 

Merci aux Pr Jean-Christophe Saurin, chef du service d'hépato-gastroentérologie au CHU de Lyon et du Pr Patrick Marcellin, hépatologue. à l'hôpital Beaujon et président de l'APHC (Association pour l'amélioration de la prise en charge des patients atteints de maladies chroniques du foie).

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