Sarcome de Kaposi : symptômes, évolution, transmission

Le sarcome de Kaposi est une maladie rare qui est causée par la prolifération de cellules vasculaires conduisant à l'apparition de lésions cutanées, plus fréquente chez l'homme. Elle est liée à une infection par le virus Herpès. Eclairage avec le Pr Céleste Lebbé, responsable du centre des cancers cutanés du service de Dermatologie à l'hôpital Saint-Louis à Paris.

Sarcome de Kaposi : symptômes, évolution, transmission
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Définition : c'est quoi le sarcome ou maladie de Kaposi ?

La maladie de Kaposi est une maladie rare qui se développe généralement au niveau de la peau. "Elle se caractérise par la prolifération de cellules qui s'apparentent à des cellules lymphatiques et cette prolifération est due à une infection virale, par un virus du groupe Herpès, Herpès 8 (HHV-8)", explique le Pr Céleste Lebbé. La fréquence de l'infection par le virus HHV-8 est hétérogène dans le monde : très répandu en Afrique subsaharienne (plus de 50 % de la population a été en contact avec le virus, en général dans l'enfance) et dans les pays du pourtour du bassin méditerranéen, cette infection virale est beaucoup moins fréquente en Occident.

Il y a plusieurs formes de Kaposi :

  • le Kaposi classique qui survient chez des personnes en règle générale âgées (âge médian : 70 ans) du pourtour du bassin méditerranéen,
  • le Kaposi endémique (Afrique subsaharienne) ;
  • le Kaposi épidémique, associé au VIH, se révèle chez des personnes plus jeunes ;
  • le Kaposi iatrogène (induit par les médicaments) chez des  patients greffés d'organes préalablement infectés par HHV-8 et dont le traitement immunosuppresseur va favoriser la réactivation du virus.

Quels sont les signes d'un sarcome ou maladie de Kaposi ?

Dans la forme classique, les lésions prédominent au niveau des extrémités, notamment les pieds et les jambes. Le plus souvent, il n'y a pas de démangeaisons.

En règle générale, la maladie de Kaposi se traduit par des signes au niveau de la peau : "les dermatologues sont souvent en première ligne pour faire le diagnostic". Les symptômes peuvent commencer par un lymphœdème, c'est-à-dire un gonflement d'un membre le plus souvent un pied ou une jambe, ou par l'apparition de lésions cutanées. "Cette maladie peut associer des taches planes (macules), rouge violet (souvent prises à tort par des non dermatologues pour des problèmes veineux), des lésions en relief (papules ou placards) toujours avec une couleur rouge ou violine, et puis des lésions franchement en relief,  surélevées, comme des "boules" qu'on appelle nodules. Tout cela peut être associé chez une même personne", précise le Pr Lebbé. Dans la forme classique, les lésions prédominent au niveau des extrémités, notamment les pieds et les jambes. Le plus souvent, il n'y a pas de démangeaisons. Parfois, les lésions peuvent s'ulcérer et devenir douloureuses. "La gêne esthétique varie selon le nombre et la forme des lésions, et surtout selon l'âge du patient". Les muqueuses sont plus souvent atteintes dans les formes liées au VIH, ou iatrogènes. L'atteinte de la bouche est souvent prédictive d'une atteinte digestive. "La fréquence et la gravité de la maladie de Kaposi liée au VIH a beaucoup diminué depuis 1995 grâce au traitement antirétroviraux (les traitements qui permettent le contrôle de l'infection VIH)", ajoute le Pr Lebbé.

Schéma du Sarcome de Kaposi
Schéma du Sarcome de Kaposi © designua - stock.adobe.com / Journal des Femmes

Si 10 à 20 % des Méditerranéens et plus de 50 % des Africains sont infectés par ce virus, seulement une faible proportion développera une maladie de Kaposi.

Quel est le mode de transmission du virus d'un sarcome ou maladie de Kaposi ?

Le virus Herpès 8 (HHV-8) est à l'origine de la maladie de Kaposi. Pourtant si 10 à 20 % des Méditerranéens et plus de 50 % des Africains sont infectés par ce virus, seulement une faible proportion développera une maladie de Kaposi. Cela veut dire qu'il y a d'autres facteurs influençant l'apparition de la maladie, ceux-ci sont encore méconnus. La transmission du virus HHV-8 se fait essentiellement par :

  • voie salivaire,
  • des contacts rapprochés, typiquement au sein d'une fratrie,
  • voie sexuelle.

Comment pose-t-on le diagnostic d'un sarcome ou maladie de Kaposi ?

Le diagnostic de la maladie de Kaposi se fait par biopsie d'une lésion au niveau de la peau : l'anatomopathologiste va analyser les prélèvements et repérer les antigènes du virus HHV-8. Les résultats sont rapides (sous quelques jours).

Quel est le traitement d'un sarcome ou maladie de Kaposi ?

Le traitement du Kaposi est différent selon que le patient présente une immunodépression ou non. La prise en charge d'une maladie de Kaposi repose tout d'abord sur un dépistage d'une éventuelle infection VIH ; la sérologie est obligatoire bien sûr après information et accord du patient.

En cas d'infection au VIH : Le traitement reposera sur la prise en charge par des équipes spécialisées avec mise en route d'une association d'antirétroviraux, éventuellement associée selon la gravité et la gêne du patient à des traitements locaux ou généraux spécifiques du Kaposi. "Dans ce cas, la clé du succès à long terme est la prise en charge de l'infection VIH".

► Dans le cas d'une Kaposi endémique ou classique, le traitement va dépendre de l'étendue, de l'évolutivité des lésions, de la gêne du patient et de son état général. Ainsi, chez certains patients une surveillance simple peut être préconisée : "chez un homme de 80 ans, on ne va pas forcément traiter. Ce n'est pas parce que l'on va enlever une lésion que l'on va empêcher d'autres lésions d'apparaître" ; chez d'autres patients, un traitement dit local pourra être envisagé. Selon le type de lésions, on peut proposer soit de la chirurgie, soit de la radiothérapie, soit des lasers à colorant, soit des crèmes à base de rétinoïdes. Un autre traitement local est évalué à l'hôpital Saint-Louis, "on a développé un protocole de recherche évaluant l'efficacité d'une sorte de vaccin, que l'on injecte dans les lésions avec des résultats intéressants".

Dans les formes plus diffuses ou franchement évolutives, on va bloquer la poussée avec des traitements généraux systémiques : des chimiothérapies courtes de moins de 6 mois, des immunothérapies avec l'interféron à petite dose.  "Nous avons développé à Saint-Louis avec le Dr Julie Delyon, un essai thérapeutique sur les anticorps anti-PD1, une nouvelle forme d'immunothérapie où on essaie de stimuler les lymphocytes antitumoraux. Les résultats préliminaires sont remarquables bien que restant à confirmer avant d'envisager une éventuelle autorisation de mise sur le marché", ajoute-t-elle.

En général, le Kaposi n'est pas une maladie mortelle, elle peut être silencieuse pendant des mois ou des années

Peut-on guérir complètement d'un sarcome ou maladie de Kaposi ?

La maladie de Kaposi classique ou endémique est une maladie chronique à évolution cyclique : "en général, le Kaposi n'est pas une maladie mortelle, elle peut être silencieuse pendant des mois ou des années. Le traitement n'est pas curatif : à l'hôpital, on voit plutôt des patients avec des formes sévères et chroniques chez lesquels on peut traiter efficacement les poussées". Quand la maladie de Kaposi survient dans un contexte d'infection VIH, on peut observer une rémission très prolongée à 1-2 ans après le début du traitement antirétroviral. Celle-ci s'apparente à une guérison. "Celle-ci est possible grâce à la patience et à l'observance du patient. Le traitement antirétroviral pourra parfois être accompagné d'une chimiothérapie dans des formes sévères de la maladie".

Merci au Pr Céleste Lebbé, responsable du Centre des cancers cutanés du service de Dermatologie, hôpital Saint-Louis, Institut du Cancer AP-HP Nord, Université Paris-Cité.