Prolapsus génital : tout savoir sur la descente d'organes

Prolapsus génital : tout savoir sur la descente d'organes

Les systèmes de soutien des organes pelviens chez la femme peuvent lâcher : c'est ce qu'on appelle la descente d'organes ou le prolapsus génital (utérin, vessie...). Quels sont les symptômes ? Quels traitements pour le soigner ? Schéma et explication avec le Dr Patrick Aubé, médecin généraliste.

Le prolapsus génital, plus connu sous le nom de "descente d'organes" se définit par le glissement vers le bas, dans le vagin, d'un ou plusieurs organes pelviens : l'utérus, la vessie (cystocèle) ou le rectum. Cette pathologie concernerait, selon la Haute Autorité de Santé, entre 30% et 50% des femmes de tous âges (tous stades confondus). Parmi les causes : les grossesses, les accouchements multiples ou encore la ménopause. En première intention, la HAS recommande un traitement conservateur, autrement dit la mise en place d'un pessaire, un anneau à introduire dans le vagin pour remonter et maintenir les organes en place. Si cela ne suffit pas, la chirurgie peut être envisagée, à condition de réaliser au préalable une évaluation complète du profil de la patiente, de ses symptômes et ses antécédents...Qu'est-ce qu'un prolapsus ? Quels sont les symptômes ? Quels traitements pour le soigner ? Quand faut-il opérer un prolapsus ?

Définition : qu'est-ce qu'un prolapsus ?

La descente d'organes est un trouble gynécologique qui se traduit par le déplacement anormal d'un ou plusieurs organes du bassin (ou pelvis) chez la femme. Trois organes sont principalement concernés : l'utérus (cas le plus fréquent), l'urètre, la vessie et le rectum. "Le prolapsus de l'urètre est très rare et de cause différente", rassure le médecin généraliste. On parle de prolapsus lorsqu'un ou plusieurs de ces organes, normalement maintenus par des muscles et des ligaments, se déplace vers la cavité vaginale. Il existe plusieurs prolapsus génitaux selon le ou les organes déplacés, dont le cystocèle (descente de la vessie), le plus fréquent des prolapsus, le rectocèle (descente du rectum), et l'hystérocèle (descente de l'utérus).

Quels sont les différents stades d'un prolapsus ?

  • Stade 0 : Pas de prolapsus
  • Stade 1 : Prolapsus intra-vaginal
  • Stade 2 : Le point le plus bas du prolapsus est à la vulve
  • Stade 3 : Le prolapsus commence à s'extérioriser
  • Stade 4 : Le prolapsus est entièrement extériorisé

Quelles sont les causes d'un prolapsus ?

Les causes d'une descente d'organes peuvent être très variées. Tous les organes pelviens, utérus, vessie, rectum sont maintenus à leur place naturelle à la fois par des ligaments (qui solidarisent les organes entre eux) et par des muscles (les muscles du périnée qui ont un rôle de soutènement). A la défaveur de certains événements, il peut arriver que les ligaments s'étirent et/ou que les muscles se relâchent. Les organes sont ainsi désolidarisés les uns des autres. "L'âge, des grossesses répétées, un accouchement difficile, la ménopause, l'obésité ou encore une constipation chronique sont parmi les causes les plus répandues. D'autres mécanismes sont reconnus :  la toux chronique, des antécédents de chirurgie pelvienne, la présence de fibromes utérins ou encore le port répété d'objets lourds", précise le Dr Patrick Aubé.

Quels sont les symptômes d'un prolapsus ?

► En cas de cystocèle (descente de vessie) :

Un prolapsus génital peut entraîner différents types de symptômes, selon l'organe ou les organes concernés. En cas de cystocèle (descente de vessie) :

  • sensation de boule à la vulve,
  • gêne ou sensation de lourdeur du périnée,
  • difficulté à uriner avec jet faible et sensations de mal vider la vessie,
  • envies fréquentes et/ou impérieuses d'uriner,
  • infections urinaires à répétition (causées par une mauvaise vidange de la vessie).
Anatomie normale à gauche / Descente d'organes à droite © Peter Lamb - 123RF

► En cas de hystérocèle (descente d'utérus) :

  • boule à la vulve,
  • dans les cas devenus rares de prolapsus extériorisé, on peut voir des petits saignements, une ulcération voire une infection de la muqueuse.

► En cas de rectocèle (descente de rectum) :

La sensation de boule à la vulve peut également exister mais ce sont les symptômes rectaux qui prédominent :

  • constipation,
  • difficultés d'évacuation des selles,
  • petites fuites de matière fécale

Quels examens pour diagnostiquer un prolapsus ?

Si vous ressentez régulièrement ce genre de symptômes, il faut consulter votre gynécologue qui pourra faire un diagnostic. L'idéal est de savoir surmonter les tabous liés aux gênes psychologiques (notamment sur la vie sexuelle) pour pouvoir trouver une solution adaptée et ne plus endurer ces douleurs au quotidien. D'où la nécessité de consulter pour traiter au plus vite la cause du problème et soigner les symptômes associés. Les examens complémentaires sont peu nombreux :

► "un examen cyto-bactériologique des urines (ECBU) à la recherche d'une infection urinaire ;

► un examen urodynamique est souvent demandé afin de clarifier les problèmes de vessie et de sphincter urinaire ; dans certains cas complexes comme les récidives après chirurgie,

► l'imagerie médicale (échographie, colpocystogramme, IRM pelvienne) peut être utile"

Dans une note du 9 juin 2021, la HAS recommande au professionnel de santé de réaliser un examen clinique pour confirmer le diagnostic, éliminer toute autre pathologie et évaluer le prolapsus observé (le symptôme le plus spécifique d'un prolapsus étant la boule vaginale perçue ou ressentie par la patiente). Ce n'est que lorsque le prolapsus génital est symptomatique ou compliqué, qu'il nécessite une prise en charge thérapeutique le plus souvent pluridisciplinaire ; prise en charge qui doit reposer sur une décision médicale partagée entre le professionnel et la personne concernée.

Comment soigner un prolapsus ?

"Le traitement va varier en fonction du stade de prolapsus génital, de l'âge physiologique de la patiente et des plaintes qu'elle exprime", poursuit le Dr Patrick Aubé. Il existe des traitements dits conservateurs, permettant de soulager la patiente sans avoir besoin d'une chirurgie. Ils peuvent aussi être proposés en association, en complément ou en attente d'une intervention chirurgicale

► En première intention, la mise en place d'un pessaire, autrement dit un anneau à introduire dans le vagin pour remonter et maintenir les organes en place, est indiquée quels que soient l'âge et le stade de sévérité du prolapsus. Il permet de soulager la patiente et peut être associé à de la rééducation, notamment du plancher pelvien qui est recommandée en cas de prolapsus modéré.

►  Modifier son hygiène de vie : perdre du poids si nécessaire, retrouver une alimentation équilibrée, une activité physique adaptée, éviter les activités sportives brutales, privilégier la natation, traiter ou prévenir une constipation chronique.

La rééducation périnéale, pratiquée par un(e) kinésithérapeute ou une sage-femme, vise à renforcer la musculature périnéale et à ralentir l'évolution du prolapsus génital. Cette rééducation améliore le confort, surtout urinaire, et diminue les sensations de pesanteur intra-vaginale.

Comment se passe l'opération d'un prolapsus ?

La cause à la base du prolapsus est évidemment traitée si possible (constipation, ménopause, etc.). En revanche, si les traitements conservateurs s'avèrent insuffisants et face à un prolapsus de stade avancé et handicapant une chirurgie devient nécessaire. Avant toute intervention, la HAS recommande au spécialiste de réaliser une évaluation pour, entre autres, évaluer les symptômes du prolapsus et leur impact, évaluer le profil médical de la patiente et les traitements qu'elle a déjà reçus. En cas de prolapsus génitaux complexes, la HAS recommande la mise en place d'une concertation menée par une équipe comprenant plusieurs professionnels de santé dont les compétences sont à adapter selon le type de prolapsus. La HAS précise également que le choix de la technique chirurgicale dépend des symptômes, du type de prolapsus génital, des comorbidités et des attentes de la patiente et décrit comment surveiller cette dernière après une intervention. L'opération chirurgicale consiste à poser une prothèse synthétique de renfort implant pelvien, visant à soutenir les organes qui s'affaissent. Globalement, on estime que 10% à 20% des prolapsus sont pris en charge chirurgicalement. Le but de l'intervention est de repositionner correctement la vessie, le vagin, l'utérus et le rectum dans le petit bassin et de compenser les défaillances du plancher pelvien (périnée) par le soutènement ou la suspension des organes. La pose d'un implant pelvien se fait :

► soit par voie abdominale (voie haute) par coeliochirurgie, c'est la technique la plus souvent utilisée chez la femme jeune.

► soit par voie vaginale (voie basse), c'est la technique indiquée chez les femmes âgées ou en cas de contre-indication à la chirurgie par voie abdominale.

► et en cas d'incontinence urinaire associée, un dispositif en treillis supplémentaire peut être inséré sous l'urètre (le conduit de sortie de la vessie).

► "enfin s'il existe une pathologie utérine associée (fibrome), il arrive qu'une hystérectomie, ablation de l'utérus et des ovaires, soit indiquée", remarque le médecin généraliste. Et de préciser : "en revanche, rien d'efficace n'a été prouvé en ce qui concerne l'ostéopathie et les ceintures de maintien".

Suite à la restriction d'utilisation des implants pelviens qui ont entrainé des complications chez des patientes opérées ( douleurs et infections notamment), la Haute Autorité de Santé (HAS) publie le 9 juin 2021 une recommandation qui définit les bonnes pratiques de la prise en charge du prolapsus génital féminin. En France, ces implants ont fait l'objet d'une surveillance renforcée de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Aujourd'hui aucun des implants par voie basse évalués pour le traitement chirurgical du prolapsus n'a été validé, leur utilisation est suspendue, hormis dans le cadre d'études cliniques. Les implants par voie haute, eux, sont en cours d'évaluation et feront prochainement l'objet d'un avis de la HAS.

Merci au Dr Patrick Aubé, médecin généraliste auteur du livre 20 plantes médicinales pour se soigner tous les jours aux Editions Leduc.