Excroissance osseuse : pied, main, comment l'enlever ?

Les excroissances osseuses peuvent avoir plusieurs origines comme l'arthrose ou la maladie des exostoses multiples et peuvent concerner la main, du pied, le genou... Quelles causes ? Faut-il et comment l'enlever ? Expertises de nos spécialistes.

Excroissance osseuse : pied, main, comment l'enlever ?
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Définition : c'est quoi une excroissance osseuse ? 

"Sur le plan scientifique, les excroissances osseuses sont des tumeurs qui peuvent être bégnines ou malignes (cancer), explique le Dr Régis Gamain, chirurgien orthopédiste. Elles peuvent être liées au cartilage au niveau des os longs (ce sont les cas les plus fréquents), à l'os ou au tissu conjonctif. Dans notre quotidien, on traite généralement des ostéochondromes, une tumeur osseuse bénigne fréquente (mais pas douloureuse) qui part des zones cartilagineuses des os longs". Contrairement au kyste qui est liquidien, les excroissances osseuses sont figées et dures. Parfois elles se développent à plusieurs endroits du squelette. "Cela arrive dans 3 à 5 % des cas". Selon les cas, "les excroissances osseuses peuvent provoquer des douleurs, des rougeurs, de la fièvre et une gêne si elle est située sur un trajet tendineux, ligamentaire, vasculaire ou nerveux. En cas de gêne, il faudra alors les enlever chirurgicalement". 

Excroissance osseuse de la main 

"Il faut distinguer 2 types d'excroissances osseuses, détaille le Dr Thomas Apard, chirurgien de la Main, du Poignet et du Coude : les tumeurs osseuses (en très grande majorité bénigne) et les ostéophytes (réaction naturelle de l'organisme face à l'usure de l'articulation). La radiographie fera le diagnostic. Selon l'aspect, le radiologue peut proposer un scanner ou une IRM". Le traitement d'une excroissance osseuse de la main est chirurgical. "Pour les tumeurs osseuses, il faut s'adresser à un spécialiste de la main ou un service spécialisé dans les tumeurs. Pour l'arthrose, il faut en général réparer l'articulation pour éviter que les ostéophytes repoussent en quelques mois. Le plus important est de faire un diagnostic : toutes les excroissances ne s'opèrent pas !".

Excroissance osseuse du pied 

"Les excroissances osseuses du pied sont très rarement des tumeurs malignes, confirme le Dr Cyrille Cazeau, chirurgien-orthopédiste. Suspectées sur une imagerie, seule une biopsie analysée au microscope pourra affirmer le diagnostic". Les excroissances osseuses sont des déformations visibles sur différents endroits du pied. Parmi elles : 
► Les orteils en griffe : les orteils de replient sur eux-mêmes de manière transitoire puis définitive, l'articulation restant bloquée en flexion, gênant par frottement le chaussage.

L'hallux valgus (ou oignon en langage populaire) : Il s'agit d'une excroissance liée à la déformation du premier métatarsien, qui dévie l'os du gros orteil. "C'est gênant et douloureux, ce qui conduit souvent à un geste chirurgical pour corriger l'axe du gros orteil. Plusieurs solutions existent comme la chirurgie percutanée réalisée au travers d'incisions de quelques millimètres, associée à une anesthésie locale du pied prolongée, elle permet au patient de remarcher tout de suite et sans béquille ni chaussure postopératoire médicalisée".

L'arthrose à la base du gros orteil (ou Hallux rigidus) est liée à une dégradation articulaire. "Il en résulte une usure prématurée qui va engendrer des douleurs dans l'articulation métatarso-phalangienne du gros orteil et une raideur. Là encore, le traitement est chirurgical. On va bloquer cette articulation de manière définitive avec du matériel solide (vis et plaque), pour permettre au patient de remarcher tout de suite". Il n'y a pas de handicap dans la vie de tous les jours ni pour la majorité des sports.
Le pied creux : cette forme de pied très arqué oblige les os à travailler de façon asymétrique. "On parle de "tarse bossu". Sur ce genre de pathologie, on peut également pratiquer de la chirurgie percutanée pour raboter les os".
La maladie d'Haglund est au départ une anomalie de croissance de l'os du talon qui fait saillie en arrière pouvant entrainer une inflammation du tendon d'Achille à son contact. "Les chaussures avec contrefort rigide créent et entretiennent cette pathologie douloureuse". 
"Dans tous les cas, le premier contact doit se faire avec un pédicure podologue qui peut en première intention proposer des semelles ou des orthoplasties. Le chirurgien sera vu dans un second temps en vue d'une opération après échec des premiers traitements". 

Excroissance osseuse du genou 

Se développant souvent au niveau des extrémités des os longs, les excroissances osseuses sont notamment fréquentes au niveau de la jambe avec l'exostose du genou. "Elles se situent au niveau de la jonction du cartilage fémur/tibia, dans la zone de croissance des os longs", précise le Dr Gamain. Au niveau du genou, on peut également diagnostiquer une tumeur maligne de l'os : "elle prend le plus souvent naissance dans les os longs de la jambe, autour du genou. Elle est plus susceptible d'être détectée chez des personnes âgées entre 20 et 30 ans. Cette tumeur est parfois appelée sarcome ou ostéoclastome. Elle est localement agressive, douloureuse car elle attaque la structure de l'os et nécessite une consultation médicale rapide".

Excroissance osseuse de la bouche 

"Une excroissance en bouche est une prolifération osseuse exagérée, résume le Dr Philippe Lesclous, PU-PH en Chirurgie Orale. Les causes peuvent être diverses : 
► Physiologiques : On les appelle des tori (ou torus s'il s'agit d'une excroissance unique). Elles sont fréquentes, inoffensives et de nature génétique. "Elles sont généralement localisées sur la face interne de la mâchoire inférieure (mandibule), au niveau des prémolaires et au milieu du palais osseux (maxillaire). Les tori sont asymptomatiques et ne nécessitent pas de traitement puisqu'elles n'interfèrent pas avec la fonction (manger, boire ou parler) ni avec l'esthétique puisque non accessibles au regard extérieur. En revanche, on peut les corriger chirurgicalement (les enlever) à des fins thérapeutiques, c'est-à-dire si leur présence gène la pose d'une prothèse dentaire amovible".
► Pathologiques. Il faut ici distinguer :
→ "Les excroissances malignes comme l'ostéosarcome (OS) des mâchoires qui provoquent des douleurs, une baisse de la sensibilité des tissus recouvrant l'os (les gencives) voire des troubles fonctionnels (gêne à la mastication, à la déglutition) lorsque leur développement est important". La prise en charge se fait dans des services hospitaliers de cancérologie maxillo-faciale. "En fonction de l'importance du processus tumoral, le traitement repose sur la chirurgie, la chimiothérapie la radiothérapie, ces différentes approches pouvant être associées". Cette pathologie reste très rare en bouche.
Les excroissances infectieuses (ostéomyélite par exemple)."Il s'agit d'infections endo-osseuses, d'origine dentaire ou traumatologique le plus souvent, qui vont engendrer une tuméfaction osseuse secondaire. Les symptômes sont des douleurs, une perte de sensibilité des tissus de recouvrement (la gencive principalement), voire des symptômes plus généraux (fièvres, frissons)". Une diffusion aux tissus environnants (langue, gencives…) est possible entraînant une gêne est fonctionnelle (difficultés à avaler, à mastiquer)… "Le traitement repose en première intention sur des antibiotiques adaptés au long cours, l'élimination de la cause (avulsion dentaire par exemple) et éventuellement sur un geste chirurgical visant à nettoyer le foyer infectieux".
Dans tous les cas, le diagnostic est clinique grâce à l'examen de la cavité buccale réalisé par le chirurgien-dentiste ou le stomatologue. "Des examens complémentaires peuvent être demandés comme une radio panoramique des mâchoires ou un CBCT (Cone Beam Computed Tomography), permettant une investigation tridimensionnelle des mâchoires".

Le patient s'en aperçoit en palpant une "boule dure"

Quelles sont les causes d'une excroissance osseuse ? 

Les tumeurs osseuses n'ont pas de cause véritable. "Le patient s'en aperçoit en palpant une "boule dure" ou lors d'un examen radiologique réalisé pour une autre raison (découverte fortuite)", répond le Dr Apard. "Les ostéophytes sont dus à l'arthrose". L'arthrose peut être génétique, hormonale, ou post traumatique. Concernant les exostoses multiples, ils sont dus à une affection rare du squelette qui concerne environ 20000 personnes en France et qui se manifeste par des bosses sous la peau.

Comment pose-t-on le diagnostic d'une excroissance osseuse ? 

"Il faut s'adresser à un spécialiste de l'appareil locomoteur", précise le Dr Apard : le rhumatologue, médecin du sport, médecin rééducateur ou chirurgien orthopédiste. "Le diagnostic est avant tout d'abord clinique, reprend le Dr Gamain. On va palper la zone du relief osseux pour voir la densité. Puis la radio permettra de confirmer le diagnostic". Une IRM ou un scanner peuvent être demandés en complément. "Si la taille de l'excroissance se situe entre 2 et 5 cm, il faut consulter un médecin rapidement".

Quel est le traitement d'une excroissance osseuse ? 

"Lorsqu'ils n'engendrent par de douleurs ni de gêne, les ostéophytes (arthrose) ne nécessitent pas de traitement spécifique mais une surveillance régulière par le médecin", conseille le Dr Gamain. On peut avoir recours à des attelles, une canne, des orthèses (prothèses) pour soulager les articulations. "Les tumeurs osseuses sont généralement enlevées chirurgicalement".

Quand et comment enlever une excroissance osseuse ?

On enlève une excroissance osseuse lorsqu'elle est gênante et douloureuse. "Si elle est située en sur une extrémité - main ou pied -, on procèdera avec une anesthésie loco-régionale. Pour une autre articulation, le patient sera endormi avec une anesthésie générale. L'excroissance sera envoyée en service d'anatomopathologie pour analyse. Dans tous les cas, le patient sera revu régulièrement après son opération pour contrôler le risque de récidive".

Merci aux Docteurs Thomas Apard, chirurgien de la Main, du Poignet et du Coude au Centre d'échochirurgie de la main à Versailles et Responsable pédagogique du DIU d'échochirurgie ; Cyrille Cazeau, chirurgien-orthopédiste à la clinique Victor Hugo (Paris 16ème), Régis Gamain, chirurgien orthopédiste au Centre Chirurgical Montagard à Avignon, et Philippe Lesclous, PU-PH en Chirurgie Orale au CHU de Nantes.