Neuropathie sensitive : symptômes, peut-on guérir ?

Neuropathie sensitive : symptômes, peut-on guérir ?

La neuropathie sensitive est une maladie du système nerveux périphérique qui se caractérise par une atteinte des nerfs sensitifs. Classifier cette forme de neuropathie est indispensable pour en trouver les causes et espérer en soigner les conséquences.

Qu'est-ce que la neuropathie sensitive ? 

La neuropathie sensitive est une forme particulière et rare de neuropathie : "Dans le système nerveux, nous distinguons le système nerveux central comprenant la moelle et le cerveau, du système nerveux périphérique, qui englobe les nerfs périphériques. La neuropathie sensitive est donc une maladie du système périphérique, qui touche exclusivement sa partie sensitive et pas la partie motrice" explique le docteur Frédéric Taithe, neurologue. "Le neurone sensitif périphérique concerné par cette pathologie est composé d'un corps cellulaire situé dans le ganglion rachidien postérieur, relié à un axone, qui correspond en quelque sorte à un câble électrique entouré lui-même d'une gaine de myéline, servant, entre autre, à conduire rapidement l'électricité. Ces différentes parties du nerf périphérique peuvent présenter une anomalie de fonctionnement et être à l'origine d'une forme particulière de neuropathie sensitive".

Quelle est l'évolution d'une neuropathie sensitive ?

La neuropathie sensitive est classifiée selon son évolution dans le temps et sa localisation. Cette classification permet d'orienter le bilan étiologique c'est-à-dire la recherche des maladies ou des troubles à l'origine des symptômes Le mode d'évolution des symptômes est réparti en 3 types :  

  • Aiguë lorsque l'apparition des symptômes est brutale et évolutive en quelques jours ;
  • Sub-aiguë : les signes surviennent en quelques semaines voire quelques mois ;
  • Chronique : les symptômes se développent en quelques mois voire en quelques années.

Il faut distinguer 3 grands types d'atteintes anatomiques.

► La polyneuropathie sensitive "se traduit de façon symétrique, touchant d'abord l'extrémité des membres inférieurs avant d'avoir une évolution ascendante, pour toucher dans un second temps les membres supérieurs (atteinte longueur-dépendante)." Deux principales sortes de polyneuropathies existent : 

  • La polyneuropathie avec atteinte des grandes fibres nerveuses : atteinte de la sensibilité tactile fine et de la proprioception (perception de l'orientation dans l'espace de son propre corps)
  • La polyneuropathie avec atteinte des petites fibres intra épidermiques : atteinte de la sensibilité grossière et thermo-algique (sensibilité accrue à la chaleur).

► Les mononeuropathies multiples sont asymétriques et asynchrones (évolution décalée dans le temps). "Par exemple, le nerf médian du bras gauche est atteint, puis le nerf cubital du bras droit, puis le nerf de la jambe, etc", illustre le docteur Taithe.

► Les neuronopathies sensitives. Il s'agit d'une atteinte du corps cellulaire des neurones sensitifs : "de manière exceptionnelle, le corps cellulaire du neurone est détruit et engendre une dégénérescence de l'ensemble du neurone sensitif. Cette atteinte induit une expression sensitive particulière asymétrique diffuse, non longueur-dépendante, douloureuse et ataxiante (contraction neuro-musculaire". Les symptômes débutent généralement au niveau des mains, puis des jambes, ou parfois des deux en même temps. "Les neuronopathies sensitives cachent souvent des maladies graves qu'il faut diagnostiquer rapidement", complète le neurologue.

Quels sont les symptômes d'une neuropathie sensitive ? 

"L'expression clinique de la maladie est variable et dépend de la localisation de l'atteinte et de sa sévérité." Un patient présentant cette pathologie peut décrire une perte de sensibilité (hypoesthésie), des douleurs – par exemple des fourmillements (paresthésies), des brûlures ou une sensation de serrement en étau- et parfois des troubles de l'équilibre. L'examen médical peut mettre en évidence une perte de sensibilité sur un ou plusieurs modes (thermique -chaud froid-, algique, tact fin ou grossier, proprioception), une ataxie proprioceptive (trouble de l'équilibre) voire une abolition des réflexes ostéo-tendineux. 

Quelles sont les causes d'une neuropathie sensitive ? 

En cas de polyneuropathie avec atteintes des grandes fibres nerveuses, les causes recherchées sont : 

  • Les maladies inflammatoires (ou dysimmunitaires) ;
  • Les vascularites ;
  • Les hémopathies ;
  • Les causes métaboliques (dont les carence en vitamine B12 et en vitamine E, le surdosage en vitamine B6))
  • Les causes infectieuses (lèpre et VIH) ;
  • Les causes toxiques médicamenteuses (chimiothérapie) ;
  • L'hérédité, comme certaine forme de maladie de Charcot-Marie Tooth.

Les causes de la polyneuropathie des petites fibres intra épidermiques sont :  

  • Métaboliques : diabète (première cause dans les pays industrialisés) ;
  • Toxiques : alcool, médicaments ;
  • Infectieuses (VIH) ;
  • Inflammatoire et gammapathie ;
  • Héréditaires : maladie de Fabry ou de Tangier ;

Parfois, aucune cause de ces polyneuropathies sensitives n'est identifiée, on parle alors de neuropathie sensitive idiopathique, "qui concerne 1 cas sur 2, malgré un bilan complet." Les principales causes des mono-neuropathies sensitives sont les vascularites, les causes infectieuses (dont la lèpre) et les causes idiopathiques. La neuronopathie sensitive peut être d'origine dysimmunitaire, métabolique, toxique (chimiothérapie) ou génétique "à l'instar du CANVAS qui est une pathologie génétique très récemment découverte et qui a pu expliquer un grand nombre de cas dont le bilan étiologique était resté négatif jusque-là", indique le docteur Taithe.

Peut-on guérir d'une neuropathie sensitive ? 

"Tout dépend de la cause de la neuropathie sensitive. Dans bon nombre de cas on essaye surtout d'arrêter la progression de la neuropathie en traitant la cause si celle-ci a été trouvée et qu'elle est curable : par exemple si l'étiologie est toxique il faut évincer le produit responsable. Si le diabète est la cause de la maladie des nerfs périphériques, il faut équilibrer le diabète. Si la cause est infectieuse, il faut traiter par des antibiotiques ou des anti-viraux…", explique le neurologue.

Comment soigner une neuropathie sensitive ?

"Le plus important est de traiter la cause pour espérer à terme améliorer les plaintes du patient mais il ne faut pas négliger la prise en charge des conséquences immédiates de cette neuropathie. Les douleurs neurogènes sont traitées à l'aide d'antalgiques. Si la neuropathie sensitive est à l'origine d'une perturbation de l'équilibre, la kinésithérapie proprioceptive sera recommandée".

Merci au Dr Frédéric Taithe, neurologue au sein du Service de Neurologie du CHU de Clermont-Ferrand, responsable de son centre de référence des maladies neuromusculaires rares. 

  • Neuropathies sensitives, Hayet Salhi, Hôpital Henri Mondor Créteil, Novembre 2015