Alimentation de la personne âgée : besoins nutritionnels, hydratation

Avec le vieillissement, l'acte de se nourrir devient de plus en plus compliqué alors même que certains besoins nutritionnels augmentent. Comment adapter l'alimentation de la personne âgée pour prévenir la dénutrition ? Quelle place accorder aux protéines ? Réponses avec Véronique Liesse, diététicienne-nutritionniste. 

Alimentation de la personne âgée : besoins nutritionnels, hydratation
© serezniy -123RF

Personne âgée : quels besoins nutritionnels ?

Les apports alimentaires diminuent avec l'âge, une personne âgée consomme en moyenne 20-25% d'énergie en moins qu'un jeune adulte. Mais c'est surtout parce que la personne âgée bouge moins que ses dépenses énergétiques diminuent. Elle adapte donc naturellement ses apports à ses dépenses. Mais il y a d'autres raisons : perte d'appétit (car augmentation de facteurs anorexigènes circulants, modifications intestinales…), satiété plus rapide, isolement et pertes de mobilité qui ne donnent pas envie de faire ses courses ou de cuisiner. "L'apport calorique minimal d'une personne âgée est de 1500kcal/j. Pour une personne âgée en bonne santé, il faut compter 30kcal par kg tandis que pour un sénior dénutri, il faut viser 30-40kcal par kg, indique Véronique Liesse. Ce sont surtout les besoins protidiques qui sont augmentés car il y a une baisse de la réponse anabolique à l'apport protéique et un hypercatabolisme lié aux maladies. Autrement dit, la personne âgée détruit plus de protéines et répond moins bien aux apports, les utilise moins bien. Plusieurs objectifs sont alors visés : le maintien de la masse musculaire, une hydratation optimale ainsi que la compensation des éventuelles pertes d'assimilation, par exemple en zinc. Cependant, les besoins nutritionnels sont adaptés à la personne et varient selon qu'elle est suivie en hôpital, en maison de retraite ou à domicile", poursuit la diététicienne-nutritionniste. Il ne faut pas non plus négliger les vitamines et minéraux, dont le niveau nécessaire ne peut être atteint, en particulier pour assurer les fonctions cognitives et immunitaires, que si l'apport alimentaire quotidien atteint 1 500 kcal/j, comportant aussi des acides gras essentiels, comme les omégas 3. Chez une personne dénutrie, il est difficile de compenser car souvent, les pertes d'appétit importantes s'accompagnent de pertes d'assimilation. "On peut néanmoins augmenter le nombre de collations par jour et favoriser des repas caloriques ", préconise la spécialiste. 
Quant à la personne diabétique, un suivi médicamenteux et une alimentation équilibrée sont nécessaires. Comme c'est déjà difficile de la faire manger, on évite de se montrer trop strict. "La notion de plaisir est très importante, encore plus si la personne est vraiment âgée. Dans ce cas, le plaisir va passer avant les recommandations car cela n'a plus beaucoup de sens de les priver ", ajoute Véronique Liesse. 

Combien de protéines par semaine ?

Il est fondamental de surveiller et préserver la masse musculaire. Pour cela, on veille à :

  • Apporter des protéines comme la viande, les œufs, les produits laitiers et le poisson. "Les protéines végétales contribuent aussi aux apports en protéines mais sont plus difficilement assimilables. Le végétarisme chez la personne vraiment âgée est compliqué", remarque Véronique Liesse. 
  • Maintenir une activité physique avec au moins trente minutes de marche quotidienne.

Si les apports protéiques diminuent, il n'y a resynthèse qu'au détriment de certains tissus, notamment le muscle. Or, la diminution de la masse musculaire par sarcopénie représente un facteur de risque de fragilisation du sujet âgé. Il est nécessaire de manger varié, sans monotonie, principale cause d'aggravation de la diminution physiologique du goût.

Comment enrichir l'alimentation d'une personne âgée ?

Pour enrichir l'alimentation d'une personne âgée, il faut augmenter la valeur nutritionnelle des plats sans en augmenter le volume. Chaque repas doit contenir un aliment riche en protéines et en énergie. On peut, par exemple, ajouter du fromage fondu, du beurre, de la viande hachée, des œufs ou encore des miettes de thon dans les plats, notamment purées et potages. Il est également important de susciter le plaisir avec des aliments riches en calories tels que crêpes fourrées, gratins, crèmes desserts ou encore riz au lait. "Enrichir l'alimentation implique souvent l'utilisation de boissons hyperprotéinées car c'est plus facile, il y a beaucoup de calories dans un faible volume", souligne la diététicienne-nutritionniste. 

Perte de poids, régimes... Quelles précautions prendre ? 

Ne pas perdre de poids

Prise de médicaments, pathologies catabolisantes qui augmentent la production de cytokinesanorexigènes, perte d'appétit en raison de la moindre activité des neuromédiateurs orexigènes (neuropeptide Y, ghréline)...représentent des facteurs de risque de perte de poids. Toute perte de poids non récupérée est à l'origine du mauvais vieillissement, l'addition de ces petites pertes finissant par engendrer de nombreuses complications. 

Ne pas faire de régime après 70 ans

Le mot d'ordre du Dr Monique Ferry, gériatre et nutritionniste, est de proscrire les régimes après 70 ans, exception faite peut-être du régime sans sel qui peut être utilisé, pour une période limitée, sur prescription médicale. Et ce, même face à un patient diabétique dont l'appétit limité induit une difficulté à couvrir leurs besoins quotidiens, y compris en glucides. En fin de repas, ils peuvent même s'offrir des sucres "plaisir", puisque ces derniers n'augmenteront pas brutalement la glycémie. 

Régime et cholestérol

Prudence pour les patients présentant un peu d'hypercholestérolémie : Un régime préventif vis-à-vis du cholestérol a un sens entre 30 et 70 ans. Après cet âge, il faut absolument bannir les régimes restrictifs. 

Peser régulièrement toutes les personnes âgées

Il faut systématiquement peser les personnes âgées, tout comme on mesure la pression artérielle, pour réagir très vite à une perte de poids. Il faut également se renseigner sur le poids des années précédentes, être attentif à un pantalon qui baille à la taille, à une robe dans laquelle la patiente flotte... Un kilo perdu sera extrêmement difficile à rattraper, d'autant plus si la perte de poids date de quelques mois. Selon Monique Ferry, L'expérience montre d'ailleurs que les personnes âgées vieillissent mieux quand, à cet âge, l'IMC est compris entre 23 et 27. Pour favoriser l'anabolisme, il faut dans la mesure du possible accroître la consommation de protéines le matin et le midi. 

Précautions lorsqu'un régime demeure indispensable

Si le régime s'impose réellement, pour une prothèse par exemple ou en cas de très forte surcharge pondérale, il ne faut surtout pas faire maigrir la personne âgée n'importe comment. Quand le problème du poids se pose en raison d'une prothèse de la hanche ou du genou, il ne faut pas faire perdre plus de 10% du poids initial, et ce, uniquement sur du long terme, c'est-à-dire au moins une année. La personne âgée risque non seulement une dénutrition et une perte musculaire qui handicapera la rééducation, mais également une rapide reprise des réserves graisseuses pendant cette rééducation, lorsque le régime n'est plus restrictif. 

Hydratation de la personne âgée : astuces pour la faire boire

L'hydratation d'une personne âgée demeure le premier point à surveiller. La boisson participe pour plus d'un litre aux besoins du corps et les aliments apportent le litre restant. Une baisse de la consommation alimentaire fréquemment observée chez les personnes âgées est corrélée avec une baisse de l'hydratation.

Unités d'hydratation

Pour favoriser la pratique quotidienne des diététiciens et nutritionnistes, Monique Ferry recommande l'utilisation des unités d'hydratation. 

  • Un yaourt équivaut, en terme d'hydratation, à un verre d'eau. 
  • La Priorité doit être donnée à une alimentation suffisamment hydratante, en particulier riche en fruits et légumes. 
  • Proposer des boissons attractives comme des jus de fruits.

"Pour faire boire la personne âgée, il faut lui proposer souvent de l'eau, même entre les repas. S'il existe un risque de fausse route, on peut donner de l'eau gélifiée", commente Véronique Liesse. 

Quelle eau pour une personne âgée ?

"Il faut privilégier les eaux qui ne sont pas trop minéralisées pour éviter de trop fatiguer les reins, prévient la diététicienne-nutritionniste. On bannit donc les eaux comme Hépar ou Contrex et on privilégie plutôt Mont Roucous, la Volvic ou l'Évian ". 

Merci à Véronique Liesse, diététicienne-nutritionniste, auteur de Le grand livre de l'alimentation spécial énergie aux éditions Leduc.S.

Autour du même sujet